Difficile de faire une analyse de risque quand on a peu d’information sur la probabilité ou l’impact, quand on ne connaît pas vraiment notre attaquant. La COVID-19 est un nouvel attaquant, ce qui rend difficile l’évaluation de risque, particulièrement face au déconfinement.
Pourtant, la formule est simple.
Risque = probabilité x impact
Quand la COVID-19 est apparue, beaucoup ont parlé de « black swan », c’est-à-dire d’un événement difficile à prédire (probabilité=faible) et traumatisant (impact=élevé).
Or une pandémie de cette ampleur était prévisible. Les experts nous le disaient depuis un certain temps : la question n’est pas SI mais QUAND (probabilité=moyenne, ou même élevée).
La COVID-19 n’est pas un « black swan. »
L’enjeu n’était donc pas dans nos capacités de pronostics ou dans notre évaluation du risque, mais dans notre préparation aux désastres, ainsi que dans notre résilience.
Au Québec, comme ailleurs, nous en sommes maintenant à parler de déconfinement.
Or on le voit sur les réseaux sociaux, les gens, en particulier les parents, se posent la question : comment gérer le risque? Et la question est critique, parce que l’impact peut être important et même grave : on parle de maladie, mais aussi malheureusement de décès…
Que peut donc nous dire l’analyse de risque dans un pareil cas?
Rien…
Et c’est bien ce qui explique la situation difficile dans laquelle nous sommes en ce moment : l’analyse de risque se base sur une analyse de la menace qui permet d’évaluer, même si c’est à grands traits, sa probabilité d’occurrence et l’impact associé. Or sur la menace (la COVID-19), nous avons très peu d’informations solides. C’est comme si nous faisions face à un attaquant inconnu qui utilise des méthodes jamais vues auparavant et des techniques novatrices. Impossible de nous baser sur notre expérience.
Nassim Nicholas Taleb, inventeur du concept de « black swan », nous enjoignait à penser à la résilience : puisqu’il est impossible de tout prévoir, soyons au moins prêts à tout.
Le conseil est toujours valide.
Cependant, en temps de déconfinement, c’est de flexibilité et d’humilité dont nous devrons faire preuve. Flexibilité, parce que nous devrons nous adapter à des situations que nous vivons en général pour la
première fois; humilité, parce qu’il faudra accepter que nous n’ayons ni toutes les connaissances, ni l’information complète, ni l’expérience suffisante.
Ce n’est donc pas l’analyse de risque qui nous aidera dans nos décisions personnelles et peut-être même professionnelles, mais la plus ancienne philosophie.
Le temps est venu de mettre au goût du jour cette maxime de l’empereur-philosophe stoïcien Marc Aurèle :
Il nous faut trouver la force de supporter ce qui est hors de notre contrôle;
Le courage de changer ce qui est sous notre contrôle;
Et la sagesse de distinguer le premier du deuxième.
Yvan Beaulieu
Conseiller principal TI et cybersécurité (+ Docteur en philosophie et sémiotique de la cryptologie)